Les stades du développement psychosexuel : une théorie fondamentale de Freud
Le stade phallique est un concept central de la théorie psychanalytique de Sigmund Freud. Il correspond à une phase du développement psychosexuel de l'enfant, située entre 3 et 6 ans environ. Durant cette période, l'enfant découvre ses organes génitaux et éprouve inconsciemment des désirs amoureux et hostiles envers ses parents. C'est aussi le moment où se joue le fameux complexe d'Œdipe. Bien que controversée, la théorie du stade phallique offre une grille de lecture intéressante pour comprendre certains enjeux psychologiques de l'enfance. Cet article propose d'explorer les principales caractéristiques du stade phallique et ses implications dans le développement affectif de l'enfant.
DÉCOUVERTE DES ORGANES GÉNITAUX
Entre 3 et 6 ans, l'enfant explore son corps avec curiosité. Il découvre les sensations agréables procurées par le toucher de ses organes génitaux. Les garçons expérimentent les érections et les filles les lubrifications vaginales. L'enfant prend aussi conscience des différences anatomiques entre les sexes. À cet âge, les enfants s'adonnent à des jeux sexuels comme jouer au docteur. Ils se montrent très intéressés par la sexualité des adultes et peuvent poser beaucoup de questions. Selon Freud, garçons et filles croient à ce stade que tout le monde a ou devrait avoir un pénis. Il parle de "primauté du phallus".
LE COMPLEXE D'ŒDIPE
Le stade phallique est marqué par l'émergence du complexe d'Œdipe. L'enfant éprouve inconsciemment un amour exclusif pour le parent du sexe opposé. Il perçoit l'autre parent comme un rival. Chez le garçon, le complexe d'Œdipe se manifeste par un désir de possession de la mère. Il ressent une hostilité envers le père, vécu comme un concurrent. Le petit garçon s'imagine dans une relation amoureuse avec sa mère. Chez la fille, Freud parle de complexe d'Électre. La petite fille est amoureuse de son père et jalouse sa mère.
Le complexe d'Œdipe puise sa source dans les pulsions libidinales de l'enfant. À ce stade, la zone érogène principale devient la zone génitale. L'excitation sexuelle est dirigée vers le parent du sexe opposé. Mais l'enfant est aussi tiraillé par des sentiments ambivalents. Il aime ses deux parents et craint de perdre l'amour de celui qu'il perçoit comme un rival.
ANGOISSE DE CASTRATION ET ENVIE DU PÉNIS
Selon Freud, le garçon finit par renoncer à son amour pour sa mère. Il craint inconsciemment d'être puni par son père, d'être castré. C'est l'angoisse de castration. Pour apaiser cette angoisse, il abandonne ses désirs œdipiens. Il s'identifie à son père et intériorise son autorité.
Freud pense que la résolution du complexe d'Œdipe est plus aisée chez le garçon. En effet, il possède un pénis et peut s'identifier plus facilement au parent rival. Chez la fille, le complexe d'Œdipe est précédé par l'envie du pénis. En découvrant son absence de pénis, elle l'interprète comme une punition. Elle reproche inconsciemment à sa mère de l'avoir faite "incomplète". La petite fille investit alors son père, espérant recevoir de lui un pénis puis un bébé en grandissant.
DÉCLIN DU COMPLEXE D'ŒDIPE
Le déclin du complexe d'Œdipe chez le garçon est motivé par l'angoisse de castration. En s'identifiant à son père, il renonce à son amour exclusif pour sa mère. Il accepte la "loi du père", c'est-à-dire le principe de réalité et l'interdit de l'inceste. Le petit garçon intériorise les interdits parentaux sous la forme d'une instance morale, le Surmoi. Le Surmoi agit comme une conscience qui punit l'enfant lorsqu'il a des pensées ou des comportements répréhensibles.
Chez la fille, la résolution de l'Œdipe passe par l'identification à la mère. Elle accepte sa féminité et son absence de pénis. Elle espère recevoir plus tard un enfant du père, par le biais d'un homme qui deviendra son mari. Freud pense que le Surmoi de la fille se construit sur un mode plus souple et graduel que celui du garçon. Les petites filles intériorisent moins brutalement les interdits.
La résolution du complexe d'Œdipe n'est jamais totale. Des traces inconscientes persistent chez l'adulte et peuvent se manifester dans certains symptômes ou traits de personnalité. Un Œdipe mal résolu peut fragiliser narcissiquement le sujet et entraver ses relations amoureuses. Mais le plus souvent, le complexe d'Œdipe permet à l'enfant de se structurer psychiquement. Il apprend à canaliser ses pulsions dans des voies socialement acceptables.
CRITIQUES ET CONTROVERSES
La théorie du complexe d'Œdipe a suscité de nombreuses critiques. Certains remettent en cause l'universalité du complexe d'Œdipe. Ils soulignent que tous les enfants ne grandissent pas dans une famille nucléaire avec deux parents de sexe différent. La théorie freudienne semble calquée sur le modèle familial bourgeois de son époque. Des anthropologues comme Malinowski ont montré que le complexe d'Œdipe n'existe pas dans toutes les cultures.
D'autres dénoncent le caractère adult-centré de la théorie. Freud plaque sur l'enfant une sexualité et des fantasmes d'adulte. Il néglige les spécificités de la sexualité infantile. Des psychanalystes comme Mélanie Klein ont proposé d'autres modèles pour penser les conflits psychiques précoces, dès la petite enfance.
La théorie de l'envie du pénis et du complexe d'Électre chez la fille a été particulièrement décriée. Des auteures féministes comme Karen Horney ou Simone de Beauvoir y voient une conception misogyne de la sexualité féminine. Freud définirait la féminité comme un manque, une incomplétude. Il ferait de l'homme et du phallus la norme à laquelle la femme cherche à se conformer. Ces critiques ont conduit certains psychanalystes à repenser la féminité et la sexualité féminine.
CONCLUSION
Malgré les critiques, la théorie du stade phallique reste une référence dans le champ de la psychanalyse. Elle offre une grille de lecture pour comprendre certains enjeux psychiques de l'enfance. Le complexe d'Œdipe met en lumière l'ambivalence des sentiments de l'enfant envers ses parents. Il montre comment l'enfant structure son identité sexuée en s'identifiant au parent du même sexe.
Mais la théorie freudienne gagne à être remise en perspective. Le complexe d'Œdipe n'est pas un passage obligé universel. Il prend des formes variables selon les cultures et les configurations familiales. Par ailleurs, la résolution du complexe d'Œdipe n'est jamais totale ni définitive. Tout au long de la vie, l'individu rejoue inconsciemment certains enjeux œdipiens dans ses relations affectives et sociales.
Enfin, la théorie du stade phallique doit être actualisée à la lumière des évolutions sociales et des avancées de la recherche. Les identités et les rôles sexués sont aujourd'hui plus fluides et égalitaires. La diversité des modèles familiaux est mieux reconnue. De nouvelles approches en psychologie du développement éclairent les processus de construction identitaire. Tout en restant un repère théorique important, le complexe d'Œdipe gagne à être repensé de façon ouverte et non-dogmatique.
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